Maiwen Habchi
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19/12/2023 - Dernière mise à jour 29/12/2023

Valérie Attali, Olivier Jacq, Karine Martin, Isabelle Arnulf, Thomas Similowski | Année 2021

Manipulation Ostéopathique du ganglion ptérygopalatin VS Manipulation Sham pour syndrome d’apnées-hyopnées obstructives du sommeil (SAHOS) : un essai contrôlé randomisé

Pathologie:

Apnée obstructive

Type d'étude:

Essai contrôlé randomisé en cross-over

Date de publication de la recherche:

24-12-2021

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But de l'étude

  • Objectif : déterminer les effets de l’OMT sur indices d’efficacité et stabilité respiratoire chez personnes atteintes du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) modéré ou sévère
  • Critères d’évaluation mesurés :
    • Principal : évaluation de l’indice d’apnée-hypopnée (IAH)
    • Secondaires : évaluation du débit respiratoire nasal maximum (PNIF – Peak Flow Nasal Inspiratoire) et de la stabilité des voies respiratoires supérieures par mesure de la pression de fermeture critique à l’éveil (Pcrit) ; sensations perçus après traitement ; effets indésirables

Intervenants

  • Nombre : 30 personnes (6 femmes et 24 hommes, âge moyen de 57 ans)
  • Critères d’inclusion : adultes (âge ≥ 18 ans), avec SAHOS, IAH compris entre 15/h et 45/h, indice de masse corporelle ≤ 40 kg/m2
  • Critères d’exclusion : femmes enceintes, mères en période d’allaitement, personnes présentant une obstruction nasale, antécédent d’intervention chirurgicale pharyngée, traitement en cours avec inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
  • Groupes d’étude : 2 groupes obtenus par randomisation
    • Groupe 1: OMT puis traitement fictif (sham), 14 personnes
    • Groupe 2: traitement sham puis OMT, 16 personnes
    • Avant l’étude, on analyse 20 personnes en bonne santé (âge compris entre 18 et 40 ans, faible probabilité de SAHOS selon score de Berlin, indice de masse corporelle < 30 kg/m2) selon le même modèle randomisé en cross-over

Interventions et évaluations

  • Évaluation de l’IAH par polysomnographie en début d’étude, le soir après le premier traitement, 21 jours après le premier traitement et au soir après le deuxième traitement
    • On évalue également : le temps de sommeil ; pourcentage de permanence aux stades N1, N2, N3, REM du sommeil ; indice de désaturation ; temps de saturation partielle en oxygène (SpO2) < 90%
  • Évaluation de l’obstruction nasale par mesure de PNIF et de la Pcrit (définie comme la pression négative au-delà de laquelle les voies respiratoires s’écroulent) avant, 30 minutes après et 24 heures après chaque traitement
  • Évaluation à chaque intervention de la douleur générée par VAS (Visual Analog Scale), du larmoiement produit par chaque oeil par test de Schirmer – utile pour évaluer la bonne application du traitement – et des sensations ressenties via un rapide entretien (questions fermées de type Oui/Non)
  • 1 séance d’OMT et 1 séance de traitement sham espacées de 28 jours, destinées au ganglion ptérygopalatin
    • la personne traitée doit ouvrir la bouche et tourner la tête vers le côté opposé au ganglion traité
  • OMT : pression appliquée par l’auriculaire dans la fosse ptérygo-palatine vers le ganglion ptérygopalatin, d’abord à droite puis à gauche
  • Traitement sham : introduction du doigt comme pendant l’OMT mais sans toucher le processus ptérygoïde et application de la pression sur la mâchoire
  • On demande aux patients traités avec CPAP ou orthèse d’avancée mandibulaire de suspendre le traitement pendant les 7 jours précédant la polysomnographie
    • 6 patients parviennent à suspendre le traitement, mais ont tout de même été analysés lors de l’étude
  • Traitement réalisé par un ostéopathe qui ne s’est chargé d’aucune évaluation ; évaluation réalisée par un médecin aveugle au traitement que les patients pouvaient recevoir

Résultats

  • Analyse des symptômes : l’OMT ne semble pas provoquer de baisse majeure de l’IAH par rapport au traitement sham.
  • Critères d’évaluation principaux : après 30 minutes et 24 heures après le traitement, l’OMT génère une augmentation statistiquement significative du PNIF par rapport au traitement sham qui a provoqué une légère diminution ou, au moins, sera resté sans effet.
    Quant à la Pcrit, l’analyse est faite seulement sur 21 patients en raison d’un manque de conformité pendant la mesure de 9 patients. L’OMT en favorise une baisse légère en comparaison avec le traitement sham – une Pcrit plus faible signifie une plus grande stabilité des voies respiratoires – malgré qu’on n’ait pu atteindre la significativité statistique.
  • Analyses supplémentaires : la douleur et le larmoiement sont supérieurs après l’OMT par rapport au traitement sham, atteignant la significativité statistique. De la même manière, après l’OMT tous les patients ressentent au moins une sensation (nociceptive, tactile, olfactive, gustative, auditive ou visuelle) tandis que peu de personnes ont de pareils effets après le traitement sham. 8 personnes ont un goût de sang en bouche malgré l’absence de blessures.
    Après l’OMT, plusieurs personnes disent mieux respirer par le nez alors qu’une personne dit ressentir une obstruction nasale. 15 patients remarquent des changements dans la perception de la position des articulations mandibulaires ou temporomandibulaires.
    On ne voit pas de différences entre les autres paramètres mesurés (temps total de sommeil ; pourcentage de permanence aux stades N1, N2, N3, REM du sommeil ; indice de désaturation ; temps passé avec SpO2 < 90%).
  • Effets adverses : on ne rencontre pas d’effets adverses pendant l’étude. 4 personnes reportent une légère douleur ou gêne mandibulaire les 24 heures suivant l’OMT.
  • Analyses sur échantillon de personnes saines : on ne rencontre pas de différences dans PNIF et la Pcrit entre l’OMT et le traitement sham. Les sensations reportées ressemblent beaucoup au groupe expérimental de personnes avec SOHAS.

Commentaires

En dépit d’une amélioration du débit respiratoire nasal et des voies respiratoires supérieures – amélioration comparable à celle qu’on peut obtenir par médicaments en cas de rhinosinusite ou polypes nasaux -, l’OMT ne provoque aucun changement de IAH chez les personnes atteintes de SOHAS modéré voire sévère.

Toutefois, il s’agit d’un résultat en accord avec la littérature qui montre que, bien que le traitement de l’obstruction nasale soit central en cas de SOHAS, cela n’améliore pas le syndrome en question pour autant. À l’inverse, cela implique néanmoins une meilleure qualité de vie, un ronflement moins important, un besoin mineur ainsi qu’une majeure tolérance de l’utilisation de CPAP.

Malheureusement, l’impossibilité d’analyser 9 personnes sur 30 (en somme, un tiers de l’échantillon) quant à la Pcrit empêche toute évaluation sur ce paramètre ; ce qui est dommage au vu des résultats encourageants pour l’OMT obtenus dans des études antérieures.

En prenant appui sur la littérature sur la neuromodulation pharmacologique ou opération du ganglion ptérygopalatin, et des sensations apparues suite à des interventions similaires, on peut supposer que l’OMT agisse par l’intermédiaire d’un bloc parasympathique post-ganglionnaire, bien qu’une mesure objective soit nécessaire pour tester cette hypothèse.

Il faudrait des études dont le but serait de mesurer l’effet d’un nombre majeur de séances de traitement.

La critique Osteopedia

Par Marco Chiera

Forces : calcul de la taille de l’échantillon par estimation de l’effet, bonne description de la procédure d’étude et des critères évalués ; comparaison intéressante avec un groupe de personnes en bonne santé ; étude qui poursuit une étude pilote précédemment réalisée en vue d’améliorer la connaissance sur un thème particulier ; évaluation qualitative de l’intervention, utile pour aider les praticiens à savoir ce que les patients peuvent ressentir et les aider à donner du sens à ces sensations.

Limites : petite taille de l’échantillon, surtout compte tenu des nombreux critères mesurés (même s’il s’agit de critères secondaires et exploratoires) ; les auteurs auraient pu non seulement se concentrer sur une manoeuvre spécifique mais également évaluer un traitement plus large puisque l’un des fondamentaux de l’OMT est de personnaliser les traitements ; la manière dont les effets indésirables sont évalués n’est pas précisée.

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