Maiwen Habchi
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20/02/2023 - Dernière mise à jour 14/03/2023

Yasir Rehman, Jonathon Kirsch, Mary Ying-Fang Wang, Hannah Ferguson, Jonathan Bingham, Barbara Senger, Susan E. Swogger, Robert Johnston, Karen T. Snider | Année 2022

Impact des techniques de manipulation en ostéopathie sur la gestion des vertiges causés par des troubles neuro-otologiques: revue systématique et méta-analyse

Pathologie:

Vertiges

Type d'étude:

Revue systématique avec méta-analyse

Date de publication de la recherche:

12-10-2022

Image

But de l'étude

  • Objectif: évaluer les effets de l’OMT et des techniques analogues en cas d’étourdissement (dizziness en anglais) qui conduit à une instabilité posturale et qui est causée par des conditions neuro-otologiques
  • Critères d’évaluation mesurés:
    • Principaux: incapacité liée à l’étourdissement via Dizziness Handicap Inventory (DHI), de la gravité et de la fréquence de l’étourdissement, du risque de chutes, de la qualité de vie et du retour au travail.
    • Secondaires : les taux de drop-out (les participants qui quittent l’étude), d’abandon dû à l’inefficacité du traitement ou d’effets indésirables.

Méthodes

  • Articles analysés : 12
  • Mots-clés: combinaison de plusieurs termes, libres ou comme MeSH, dérivés de la littérature ostéopathique, des symptômes de manque d’équilibre et conditions neuro-otologiques. Ces termes apparaissent au travers de la discussion avec des experts cliniques et bibliothécaires.
  • Critères d’inclusion: ECR (essai contrôlé randomisé), études observationnelles prospectives ou rétrospectives; participants âgés de plus de 18 ans et présentant des symptômes de vertiges causés par des troubles neuro-otologiques. Etudes dans lesquelles l’OMT ou des techniques similaires sont comparées à une intervention de contrôle entre un traitement sham (fictif), soins standards ou thérapie non pharmacologique (ex: exercices ou thérapies comportementales).
  • Critères d’exclusion: études sur l’étourdissement (dizziness) dus à des causes vasculaires, néoplasiques ou malignes, l’épilepsie, les neuropathies périphériques, les dysfonctionnements posturaux sans composants neuro-otologiques; études portent sur les symptômes cardiovasculaires, les étourdissements médicamenteux, les causes psychologiques, les malformations vasculaires ou les causes médicales. Études sans interventions de contrôle et où les auteurs ont rapporté des critères de jugement regroupés.

Caractéristiques des études

  • 11 études sur ECR
  • 1 étude observationnelle
  • 8 études sur l’OMT
    • 4 études sur OMT articulaire
    • 2 études sur techniques à haute vitesse basse amplitude
    • 1 étude sur OMT crânio-sacré
    • 1 étude sur inhibition progressive des structures neuromusculaires
  • 6 études sur techniques analogues à l’OMT
  • 6 études ne permettent pas ou n’enregistrent pas la consommation de médicaments pour gérer un traitement concomitant
  • toutes les études sont considérées comme étant de qualité moyenne à faible, avec 2 études à risque biais élevé, selon la norme GRADE et les outils de risque de biais de la Cochrane Collaboration (ROB-modifié pour les études ECR et ROBIN-I pour les études observationnelles).

Intervenants

  • Nombre dans la plus petite étude: 9 dans le groupe OMT et 9 dans le groupe témoin
  • Nombre dans la plus grande étude: 86
  • Total: 367, dont 180 dans les groupes OMT et 180 dans les groupes de contrôle
  • Moyenne d’âge: de 33 à 73 ans

Interventions et évaluations

  • Evaluation du handicap associée à l’étourdissement (dizziness) par IDH, de la gravité et de la fréquence de l’étourdissement (dizziness), du risque de chute, de la qualité de vie et du retour au travail.
  • Evaluation des niveaux de drop-out (les participants qui abandonnent l’étude), de l’abandon à cause de l’inefficacité du traitement ou d’évènements indésirables.
  • OMT: techniques articulaires, à haute-vitesse basse-amplitude, crânio-sacrées et d’inhibition progressive des structures neuro-musculaires.
  • Techniques analogues: techniques articulaires similaires aux techniques à basse-vitesse et amplitude-modérée; techniques de chiropraxie, physiothérapie, massage.
  • Contrôle: traitement sham, soins standards, médicaments, conseil, rééducation vestibulaire.

Résultats

  • Critères d’évaluation principaux:
    • Invalidité liée à l’étourdissement (dizziness): 3 études qui montrent que le groupe avec OMT reporte une réduction dans le score DHI. D’ailleurs, les techniques articulaires d’OMT démontrent une preuve élevée dans l’obtention de ce résultat par rapport aux interventions de contrôle, tandis que pour les autres techniques, trop d’hétérogénéité (diversité) a été constaté entre les études.
    • Gravité de l’étourdissement (dizziness): 4 études soulignent que le groupe avec OMT présente une réduction dans la gravité des symptômes issus de l’étourdissement (dizziness). Les techniques articulaires d’OMT notamment une preuve modérée dans l’obtention de ce résultat par rapport aux interventions de contrôle, alors qu’on relève pour les autres techniques trop d’hétérogénéité parmi les études. Cependant, 1 étude sur l’OMT crânien montre une plus grande amélioration des symptômes qu’une intervention de contrôle (traitement sham).
    • Fréquence de l’étourdissement (dizziness): 3 études présentent une preuve modérée de l’OMT articulaire dans la réduction de la fréquence de l’étourdissement par rapport aux interventions de contrôle. Il n’y a pas d’étude évaluant d’autres techniques.
    • Risque de chutes: l’analyse de 3 études soulignent que l’OMT crânien favorise une plus grande réduction du risque de chutes que la diphénhydramine.
    • Qualité de vie: 1 étude reporte une amélioration de la qualité de vie mentale, mais pas physique (scores mesurés par le questionnaire SF-36), obtenu par OMT conjoint.
    • Retour au travail: aucune étude n’évalue ce résultat.
  • Résultats secondaires:
    • Taux d’abandon: 3 études montrent une association plus importante, mais de faible qualité et non significative, entre l’OMT articulaire et le taux d’abandon par rapport aux interventions contrôlées. D’autres analyses considèrent toutes les techniques d’OMT ne relèvent aucun type d’association avec l’abandon des études par des participants.
    • Effets indésirables: 6 études analysent les effets indésirables. Seulement dans 3 études, des problèmes sont apparus, en particulier une augmentation des douleurs cervicales, des maux de tête (OMT et groupe de contrôle) et douleur dorsale et sentiment de ne pas être bien (seulement OMT). Une seule personne abandonne une étude en raison d’un effet indésirable post-OMT, tandis que 7 personnes d’un groupe témoin abandonnent l’étude en raison de l’inefficacité de l’intervention (traitement sham).

Commentaires

La revue montre que l’OMT et les techniques analogues peuvent être utilisées comme intervention pour gérer les vertiges (dizziness) dus à des problèmes neuro-otologiques. En particulier, l’OMT articulaire s’avère présenter des preuves modérées ou élevées dans la réduction de l’invalidité, de la gravité et de la fréquence des symptômes.

Il convient de noter qu’en raison des caractéristiques des études, une méta-analyse appropriée n’a pu être réalisé que pour l’OMT articulaire et pour ces résultats. Pour d’autres types de techniques ostéopathiques et d’autres critères de jugement, la diversité des études est trop élevé pour agréger efficacement les effets détectés.

Toutefois, selon la littérature scientifique actuelle, les résultats sur l’invalidité et les symptômes liés aux étourdissements peuvent très probablement améliorer la qualité de vie, favoriser le retour au travail et réduire le stress psychologique, l’utilisation de médicaments, la perception de l’incapacité et les limitations de mouvement. A cet égard, le fait d’avoir constaté que l’OMT améliore la qualité de vie psychologique, mais pas physique, peut découler du fort handicap physique que les vertiges peuvent entraîner, un résultat également conforme aux études orthopédiques sur le sujet. Certes, un tel résultat souligne la nécessité d’autres études qui abordent l’état de vertige d’un point de vue global, c’est-à-dire en considérant la personne comme une unité corps-esprit.

Du point de vue des évènements indésirables, l’OMT s’avère être une thérapie sûre, car les symptômes post-traitement négatifs sont peu nombreux, mineurs et une seule personne quitte l’étude à cause d’eux. Ces preuves sont certainement utiles pour pouvoir conseiller adéquatement les patients de manière exhaustive sur l’utilité de l’OMT comme traitement supplémentaire que les vertiges (dizziness).

Naturellement, la revue actuelle présente certaines limites. D’une part, plusieurs études relèvent un risque élevé de biais et une faible « puissance » (faible capacité à détecter un effet lorsqu’il se produit réellement, généralement en raison du petit nombre de participants). D’autre part, la définition d’étourdissement (dizziness) de causes neuro-otologiques n’est pas claire dans les études analysées, ce qui peut donc avoir conduit à considérer des études qui agissent sur différentes conditions.

De plus, étant donné que différentes médecines manuelles peuvent utiliser des techniques similaires de différentes manières, les résultats obtenus peuvent ne pas être généralisables. Enfin, toujours compte tenu des caractéristiques des études, il n’a pas été possible de réaliser une méta-analyse approfondie sur la relation entre l’OMT et d’autres interventions.

La critique Osteopedia

Par Marco Chiera

Forces: définition initiale d’étourdissement (dizziness) utile (surtout pour ceux qui ne sont pas anglais); avant de réaliser et publier la méta-analyse, le protocole de l’étude est élaboré et publié; élaboration précise des barres de recherche à utiliser; plusieurs tableaux et figures qui décrivent en détail les études, les participants, les interventions et les effets (même s’il manque certaines informations provenant de certaines études).

Limites: contrairement à une méta-analyse précédente, aucune recommandation n’est rapportée pour améliorer la qualité des études ostéopathiques.
Puisque l’OMT n’est pas seulement une question de techniques, mais fournit une vision paradigmatique spécifique de l’être humain, la « fusionner » avec d’autres interventions similaires d’un point de vue technique n’est pas tout à fait appropriée (comme l’ont brièvement mentionné également les auteurs), à moins que vous ne vouliez étudier l’efficacité exclusive d’une technique spécifique. Cependant, face aux recherches actuelles sur le toucher, le placebo et la relation thérapeutique, sommes-nous sûrs qu’une telle enquête est réellement possible?

En outre, des doutes subsistent quant aux critères d’inclusion des études par rapport à la définition des « conditions neuro-otologiques ». Six études incluses dans la méta-analyse ont en effet porté sur un vertige cervicogénique, qui, selon les critères internationaux de classification des troubles vestibulaires, ne semble pas s’apparenter à un problème neuro-otologique. En effet, le diagnostic d’étourdissements cervicogènes semble être le choix lorsque les causes neuro-otologiques ont été exclues. Ce fait conduirait à réviser les conclusions, en soulignant OMT  et des techniques similaires comme utiles pour les vertiges où la colonne cervicale est particulièrement impliquée, mais laissant des doutes non résolus sur leur utilité en cas de vertiges (dizziness) provenant uniquement de troubles vestibulaires.

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